par Cécile67 » Lun 22 Mar 2021 16:35
Bonjour à tous,
Etant aujourd'hui totalement remise, je tiens à vous faire partager mon histoire sur cette tumeur rare qu'est le phéochromocytome.
J'ai été opérée à l'âge de 32 ans d'un phéocromocytome surrénalien droit de 5 cm (Surrénalectomie droite par coelioscopie) en avril 2019 près de Strasbourg.
Mai 2018: Suite à l'accouchement difficile de mon premier enfant, j'ai commencé à présenter les symptômes de la maladie et j'ai subi dans les mois qui ont suivi plusieurs malaises, toujours très impressionnants.
Je sentais tout de même au fond de moi que tout cela n'était quand même pas "normal", et spontanément j'ai commencé à prendre des notes sur mon téléphone concernant mes différents symptômes et mes malaises.
Entre ma reprise du travail, mon fils à emmener et récupérer à la crèche, les allers retours en train, j’étais physiquement à bout. Au fond, je m’étais même faite à cette vie, j’étais fatiguée et au bout de moi-même en permanence.
Eté à fin d'année 2018: Je sentais quand le malaise allait se produire, toujours le même schéma, avec les jambes et les bras comme dans du coton, je ressentais une immense sensation de fatigue (importante faiblesse musculaire), parfois des tremblements, des sueurs importantess et soudainement le cœur qui s'emballe avec des pics de tension (mesurée à 17,5 allongée sur un canapé), une sensation de choc, l'impression de faire une crise cardiaque (le cœur comme enfermé dans une cage, la sensation indescriptible que la mort était imminente à cause de ce cœur devenu incontrôlable).
Contrairement à certains malades du phéo, je n’ai jamais ressenti de maux de tête.
J'ai consulté plusieurs médecins, effectué plusieurs bilans sanguins, un cardiologue m'a même posé un holter cardiaque en septembre 2018.
Malgré ces examens, rien d'inquiétant, on a mis mes malaises sur le compte d'un épuisement général lié à mon allaitement et à mon accouchement récent.
Je m'étais presque résignée et faite à l'idée que finalement, être épuisée au quotidien était tout simplement lié à mon nouveau rôle de maman (accouchement, allaitement, reprise du travail.. aucune véritable nuit pendant 4 mois).
Janvier 2019: Et le jour de mon "salut" si je puis dire est arrivé, grâce à mon chat: "Meteor".
Il a contribué à me sauver la vie si on peut le dire ainsi ! C'est grâce au miaulement que j'ai cru entendre que je suis sortie de mon lit pour aller ouvrir au chat, (certainement resté dehors par une nuit froide), c'est donc grâce à lui ou à la providence que j'ai raté une marche dans mes escaliers et que je me suis fracturée une côte.
Je n'ai pas vraiment pris conscience tout de suite que ma côte était fracturée, j'ai eu très mal suite à cette chute mais prise dans la routine métro boulot dodo, je n'ai consulté que plus d'un mois après... Un soir au travail j'ai ressenti une douleur très intense du côté droit, j’ai repensé à cette chute et le soir même j’ai consulté un jeune généraliste remplaçant, il m'a diagnostiqué cette fracture costale et m'a prescrit une échographie dans le simple but de de vérifier que tout allait bien.
Mars 2019: La surprise: J'ai rendez-vous donc pour une échographie du côté droit de l’abdomen. Le médecin qui pratique l’échographie ne dit rien pendant quelques minutes, il prend des clichés. Comme d’habitude, je transpire énormément. Il m’a alors demandé si je me sentais parfois fatiguée… Quelle révélation ! Je lui répondis que c’était mon état au quotidien depuis si longtemps !
« Vous avez une grosseur sur la glande surrénale, ça peut expliquer cela ».
Ensuite tout a été très vite.
Rapidement hospitalisée et prise en charge dans l'hôpital de mon secteur par l'endocrinologue de référence, j'ai subi différents examens: IRM des surrénales mettant en évidence cette masse de 4,5 cm, scintigraphie des surrénales avec injection, ces examens ainsi qu'un bilan catastrophique concernant les fameuses catécholamines ont permis de poser le diagnostic de phéocromocytome.
En général: c'est bénin, cependant je dois rester à l'hôpital pour qu'ils puissent intervenir en cas de nouveaux malaises, je risque AVC, crise cardiaque et la mort, à tout moment. On m'explique que c'est déjà incroyable d'avoir survécu à mon accouchement dans cet état.
Mon « phéo » est « vicieux ». En effet, les médecins ont observé chez moi une tension générale toujours bonne, alors que d’habitude, les personnes souffrant de « phéo » ont une tension élevée en permanence.
Avril 2019: L'opération s'est bien déroulée, je ressors agrafée et délestée de ma glande surrénale droite, c'est assez rude quand même de se faire opérer d'une tumeur à mon âge, toute ma famille, mes amis, ont été sous le choc de cette découverte et j'ai eu peur de mourir en laissant mon fils de 10 mois seul avec son papa. L'idée que mon fils ne puisse jamais se souvenir de moi qu'à travers des photos me glace encore le sang.
Mai 2019: Je me remets de l'opération, les douleurs provenant du gaz injecté pour la coelioscopie ont été un très mauvais souvenir. Le chirurgien me fait le compte rendu: Pas d'envahissement des organes du voisinage, cependant la tumeur avait continué à grossir en quelques semaines pour atteindre 5cm, elle est bien bénigne mais au vu de mon âge et de sa grosseur, on va présenter mon cas en RCP : Réunion de Concertation Pluridisciplinaire pour voir si une analyse génétique est nécessaire dans le but de rechercher une mutation génétique pouvant donner lieu aux maladies que vous connaissez de type: NEM ou autre mutation génétique rare.
Juillet 2019: La RCP a rapidement validé la recherche pour mon cas. Aucun cas de cancer dans ma famille, pour un endocrinologue: peu de chance que ce soit génétique, pour un autre: on vérifie quand même. J'accepte que l'on effectue les recherches génétiques, cela prend en général un an. Les prélèvements sanguins à visées de génotypage à la recherche d'une éventuelle mutation sur les gènes de prédispositions aux formes héréditaires de paragangliomes - phéocromocytomes sont envoyés à l'hôpital Pompidou à Paris via le réseau Rénaten.
Décembre 2019: Le soulagement: je n'ai aucune anomalie génétique, voici la conclusion pour mon cas :
"Ce résultat est négatif, en faveur d'une vraisemblable atteinte sporadique".
Février 2020: L'endocrinologue qui a effectué le suivi des recherches génétiques me confirme qu'il s'agit bel et bien d'une apparition sporadique.
En d'autres termes, on ne sait pas et on ne connaitra jamais l’origine de cette tumeur. Il y a de plus en plus de débats sur les perturbateurs endocriniens, je lui en parle.
Il me répond qu'effectivement ce n'est pas exclu mais qu'à ce jour la recherche ne permet pas de mettre en évidence ma tumeur avec les perturbateurs endocriniens. Il n'y a pas d'études sur ce sujet.
Je reste certes sans réponse face à cette histoire tumultueuse mais heureuse d'être en vie et chanceuse de ne pas être porteuse d'une quelconque mutation génétique.
J'espère que mon témoignage pourra aider, informer des patients à qui on annonce ce diagnostic.
Bien à vous,
C.A.